jeudi 24 avril 2014

World… il progress

Rentrée hier de Bucarest dans un état flottant : troublée, enrichie, en plein questionnement d'avenir. Malgré ma nature totalement monogame, je dois me rendre à l'évidence : quarante ans après mon exil, je suis double et, surtout, je vis dans deux langues. Tapie sagement pendant des lustres, la langue roumaine jaillit avec spontanéité et naturel dès que j'en ai besoin. Etonnante découverte. Moi qui admirais chez Cioran sa décision ferme : je suis un auteur français, je ne parle ni ne lis le roumain. Une langue à la fois s'il vous plaît. Moi qui abondais dans son sens quand il me faisait cette confidence, je constate que, théoriquement de son avis, j'ai fini par agir différemment en pratique. Je ne peux pas me priver de cette double richesse. Il s'agit de la langue bien sûr. Le tempérament, c'est encore plus compliqué : j'avais oublié cette vie un peu tribale où si l'on insulte sa belle-mère au troisième étage, au deuxième on raconte que vous l'avez battue, au premier que vous l'avez tuée et au rez-de-chaussée on distribue le gâteau des morts pour son enterrement. Nene Iancule Caragiale, tu as tout dit et écrit à ce sujet il y a cent ans. Comme Shalom Alechiem d'ailleurs. Ce matin, reprenant possession de ma machine à café et de mes chers draps de soie, il m'a semblé que je revenais d'un voyage dans le temps. J'ai une sacrée chance de pouvoir le faire. Patrick explique cette "exténuation" par le fait que, pendant sept jours, j'ai essayé de refaire un monde,de me refaire dans un monde? Comme à Paris, où je retrouve mon immeuble toujours dans les gravats. Notre Bécassine, si elle n'a pas neuf vies comme les chats a deux vies, deux langues. Peut rien faire simplement, comme tout le monde, celle-là.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Mille respects à l'ouvrière aux 2 vies ! attention dichotomie, schizophrénie,vision double et donc trouble tous les dangers sont là cela vaut bien le port d'un casque ! Beaucoup de richesses aussi viennent e l'ouverture , la multiplicité à condition de bien gérer les mondes. Relire tante Julia et le scribouillard ! Ah, Ah quelle histoire !

Anonyme a dit…

Mais Tante Julia est une allumeuse! Malheureux anonyme, ne lui donnez pas des idées! Et ce Patrick qui l'encourage aussi...