mercredi 13 août 2008

AVERSES


Ayant raté le soleil du matin, j’ai affronté tempête de sable et pluie cinglante sur la plage de l’Ecluse, avant de me réfugier sous un auvent et faire leur sort à bulots, huîtres et crevettes. Rentrée sous une averse automnale, j’en ressortis, irrésistiblement attirée par un soleil de fin d’après-midi, doux comme le miel et chaud comme une caresse. La plage du Prieuré fondait au soleil et moi avec dans une douceur des sens assoupis, rêvant d’éternel été. J’étais en train de finir « La boîte noire » de Amos Oz quand, à trois pages de la fin, j’y trouvai ces mots : « Tu diras dans tes prières que la solitude, le désir et la nostalgie sont au-dessus de nos forces. Mais que sans eux, nous ne sommes rien. Tu diras que nous avons essayé de recevoir et de rendre l’amour mais que nous avons échoué. » Je me suis mise à pleurer. Sans avoir si les larmes étaient celle de la tristesse de devoir quitter ces personnages ou si elles surgissaient d’ailleurs. Peut-être de l’avenir. Il n’y a qu’un « d » pour transformer l’averse en adverse et qu’une voyelle pour tourner la force en farce. Sorcier d’Oz et son homonyme Amos. Des larmes sans douleur, des larmes de nostalgie ? De soulagement ? Ou juste la condensation du temps qui passe ? Parce que les filles de l’ami Ferhan partent étudier à New York, loin du Constantinople paternel ? Parce qu’une trêve est signée en Georgie mettant à l’abri Christian, Lika et leurs enfants ? Parce qu’il me reste moins d’une semaine avant l’épreuve de la confrontation du 18 août ? Parce que j’ai aperçu aujourd’hui la première feuille morte sur ma route ? Mais comment vais-je faire pour m’arracher d’ici ? J’espère que le mauvais temps m’en chassera. Comme les oiseaux migrateurs. Sinon… Je sens que je m’enracine. J’ai écrit hier une carte postale à mon professeur de piano : « Je suis retenue par des affaires familiales en Bretagne. » Ce qui est vrai : je suis en train de planter mes racines, des racines en formation dans cette contrée de granit et de flots émeraude. Transplantée, je m’implante. Et j’envoie des images et des pensées comme ma marraine de radio, Margot Rick qui faisait fleurir tous les étés sur RFI ses cartes postales destinées à des auditeurs lointains. Si je n’avais pas vu leurs lettres, j’aurais cru qu’ils n’existaient pas, réduits à un prétexte à émission estivale imaginé par Margot. Mais, tels les commentaires qui reviennent enfin sur mon blog, ils existaient bel et bien.

3 commentaires:

Anca Visdei a dit…

A la demande générale, voici la légende de la photo du 12 août : je suis à sec.

Anonyme a dit…

à sec et pourtant en larmes, face à l'émotion poignante communiquée avec talent par le sorcier Oz, preuve qu'il n'est point besoin d'un long nez pour toucher à la fin de l'envoi. S'il touche c'est qu'Anca Visdei ressent, vit, partage le destin des autres d'Israel à la Georgie en passant par la Turquie On est bien loin de la solitude quand on résonne comme un tambour de guerre ou d'amour aux frappes du destin P

Anca Visdei a dit…

ouahhh, c'est si bien tourné et gentil que mon écran en rosit...