mercredi 26 août 2015

Musique des mots d'Espagne

Mon amie Elisabeth, m'envoie, suite à tant de voyages de mon côté, ce poème de Rafael Alberti. Elle m'apprend aussi qu'un éminent professeur de Cordoue, du nom de Gabriel Laguna Mariscal, professeur qui avait  tenu un blog lui-même jusqu'en 2008, souligne, en citant Ramon de la Serna qui, dans ses Greguerias déclarait que les plus beaux voyages sont ceux que l'on fait en regardant la carte. Ce Ramon de la Serna auquel le critique Jean-Louis Kuffer comparait mes premiers textes en français, Les Petits Contes cruels. La boucle est bouclée. Le poème est si beau qu'il n'a pas besoin de traduction, mais j'espère vous fournir dans l'après midi, une traduction-maison de mon amie. Place au poète  Alberti :
Elegía

La niña rosa, sentada.
Sobre su falda,
como una flor,
abierto, un atlas.

¡Cómo la miraba yo
viajar, desde mi balcón!
Su dedo, blanco velero,
desde las islas Canarias
iba a morir al mar Negro.

¡Cómo la miraba yo
morir, desde mi balcón!.

La niña, rosa sentada.
Sobre su falda,
como una flor,
cerrado, un atlas.

Por el mar de la tarde
van las nubes llorando
rojas islas de sangre.

2 commentaires:

Orvell Taurin a dit…


Et vous ? Moi, j’ai été largué. Pas tant par le poème à la navigation enchanteresse. Mais par les greguerias et par la boucle qui se boucle. Depuis l’évidence de son univers diluvien, notre blogueuse nous kiss good bye. Mais l’essentiel n’était-il pas dans les vers d’Alberti ? N’empêche. J’ai repris mon cahier de devoirs de vacances («Thinking in the brain», pour les jours de pluie) où il me restait encore beaucoup à faire, à quelques jours de la rentrée. Et j'ai décidé de remonter le chemin en partant de la case JLK – grâce à son propre blog (http://carnetsdejlk.hautetfort.com/).

Rendant compte à fin 2006 de la traduction des «Lettres aux hirondelles» de Ramon Gomez de la Serna, il nous apprend que les «greguerias» sont «la forme la plus caractéristique de l’art du poète, combinant une métaphore et une pointe d’humour dans une sorte d’aphorisme lyrique, de «fusée» ou de haï-ku non versifié.» Exemple : «L’hirondelle réussit à aller aussi loin parce qu’elle est la flèche et l’arc à la fois».

À ce titre, son : «El viaje más barato es el del dedo sobre el mapa.» est une gregueria. Qui fait le pont entre… «Les petits contes» qui nous font cruellement défaut puisqu’ils ne semblent pas avoir été réédités depuis l’époque où Madame Anca faisait avec bonheur ses premiers exercices d’assouplissement publiés en français… et, bien sûr, l’âme du poème. Soit dit en passant : Rafael Alberti avait alors tout juste la vingtaine – belle performance – et que la Sofia, la rosa un balcon plus bas, était pré-adolescente.

Avons-nous bouclé la boucle ? Mettons-y un peu de piment. Dimanche dernier, on lit dans les «Carnets de JLK» (je n’extrais que quelques bouts de phrases) : «L’appareillage du voilier, qui devait faire route jusqu’aux Antipodes, fut essentiellement du ressort du Romancier, qui installa sa commanderie dans le capharnaüm de ses bibliothèques. Au demeurant, le poème sera la seule réponse à sa propre question, son propre accord, sa propre contradiction et sa seule envolée voyageuse. Sur la table de la Commanderie se distinguent un dictionnaire de rimes et divers objets usuels, crayons de couleurs et fragments de papyrus. Bref, on va sur Midi et la Table est mise dans la commune et conviviale cantine de l’arche, et voici voleter les doigts du Creator sur le clavier de Mac le Nomade. »

Ne pourrait-on pas lui proposer d’enrichir son projet par quelques témoignages directs de la plume de qui nous a entraînés à sa suite… à Venise, en Islande, en Indonésie…

Anca Visdei a dit…

Merci de ce commentaire fin et complet, A l'époque, Jean Louis Kuffer, m'avais précisé que les Greguerias pourraient se traduire par "Criallieries" , ce qui n'entache en rien la beauté et la précision du commentaire qui précède.