Alain
Mabanckou est un bon auteur, il vient de donner sa leçon inaugurale au Collège
de France (premier écrivain élu à cette chaire) et, dans sa lettre à François
Hollande il prouve qu’il est un homme courageux et un fin épistolier et politique. Sur les
sites où sa lettre a paru, le texte est accompagné d’un abrazzo sur le point d’être
commis entre le Président de la France et Sassou-Nguesso. Je vous épargne l’image
et la remplace par une photo de Mabanckou avec votre humble servante au salon du
livre de Morges. Bravo Alain ! Pourvu que tu sois entendu !
"Monsieur le Président,
Les
Congolais de l’étranger et ceux qui luttent nuit et jour au pays ont constaté
que vous observez un long silence quant à l’issue de l’élection présidentielle
truquée qui s’est déroulée en mars dernier au Congo-Brazzaville et qui a
injustement porté Denis Sassou-Nguesso au pouvoir. Il exerce un pouvoir sans
partage depuis trois décennies avec son clan. La fraude l’aura une fois de plus
emporté sur la transparence, et ceci aux yeux des nations prétendument
démocratiques comme celle que vous dirigez par la volonté des Français.
Le nom de mon pays d’origine est désormais inscrit en rouge sur le tableau noir
du déshonneur des républiques bananières, à côté de la Corée du Nord. Pendant
ce temps, Sassou-Nguesso et ses hommes de mains multiplient les arrestations
arbitraires, allant jusqu’à cerner le domicile de l’opposant Jean-Marie Mokoko sans lui
donner la possibilité de se ravitailler.
Faut-il
rappeler, Monsieur le Président, que ces tyrans africains ont le plus souvent
survécu grâce à la protection de la France, illustrant au passage combien ils
ne peuvent vivre et prospérer sans l’assentiment de l’ancienne puissance
coloniale? Ils ressemblent de ce fait à des ogres créés de toutes pièces par la
France, et leur ultime couronnement passe par la montée des marches de l’Elysée
et la poignée de main dont ils bénéficieraient du président de la République
française. Cette dernière image, s’il arrivait qu’elle se concrétise sous votre
règne, pourrait être celle qui ternirait irrémédiablement l’ensemble de votre
quinquennat et ruinerait par voie de conséquence vos ambitions de solliciter un
second mandat auprès du peuple français."
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